Face et kangourou
Une bonne perte de face fait souvent rire... mais après coup.
Un directeur Marketing français se rend pour la première fois dans la filiale chinoise et assiste à une réunion de présentation de la prochaine campagne de pub. Le patron chinois et le responsable de l'agence créative semblent très fiers de lui présenter leur projet qui comprend notamment la présence d'une star chinoise et d'un kangourou. Le Français monte aussitôt au créneau pour dire que ces deux éléments “ne cadrent pas du tout avec l'image mondiale de la marque”, et qu'il faudrait faire des enquêtes de terrain auprès des consommateurs potentiels. Grand silence côté chinois, et grand moment de solitude côté français... Après deux journées de formation interculturelle, le Français rit de l'anecdote car il se sent mieux armé pour exercer plus efficacement son expertise et son pouvoir d'influence à l'égard du patron chinois, mais sans lui faire perdre la face.
Il a aussi acquis des éléments de compréhension de l'efficacité daoïste qui passe par l'expérimentation, l'observation, mais encore rarement par les enquêtes clients (sauf dans le e-commerce) et jamais par la modélisation d'une stratégie. Elle est bien loin de notre conception du marketing.
Dans les publicités chinoises, les stars locales ou coréennes figurent souvent, cela ajoute de la face au produit ou au service. Quant au kangourou, c'est le symbole de l'Australie, mais au-delà, de modernité.
Il n'est sans doute pas anodin que le patron chinois ait choisi un kangourou, exactement comme dans la publicité de Bank of China qui promeut une nouvelle carte permettant des paiements en RMB et en dollars australiens.
Certes l’Australie n’a rien à faire dans notre histoire. Et pourtant. A l'aube de l'ouverture du secteur bancaire chinois au marché mondial, s'aligner sur la communication de la principale banque chinoise, c'est s'assurer d'être en conformité avec la vision de l’Etat. Et donc rassurer les consommateurs. La logique ici est analogique et non pas analytique.